Ce soir
ma vodka et moi
on regarde Zazie qui passe au Bataclan
ma pensée en lambeaux
se dilue dans les éclats d'images
j'entends de sol en si son album Zizanie
le dernier
Je perçois sous les tams des djembés du raï
La voix de Cheb Mami qui passe à Bercy
et mes voiles sur les tams des djembés du raï
s'effeuillent
tandis qu'en moi un mal s'immerge
tout entier dans
les remous du déluge encore meurtrier
de Ba-el-Oued qui
inondent l'écran et me rappellent
qu'on égorge toujours
en Algérie
et des remous aux vagues
se réimpriment sur la rétine trempée
de ma petite enfance perchée sur des épaules
derrière le mur fermé aux femmes
le rythme nonchalant d'une danse
d'hommes en robes blanches
chauffant leur tambourins aux braseros des trottoirs
au JT de 20 heures
du ciel d'Afghanistan
les bombes américaines
pleuvent sur Kandaar
hier
haut plateaux d'ocre pastel
désert de souveraine humilité
défloré jusqu'à l'oubli
de béances écarlates
et dans la vallée
la terreur
dynamite ivre-folle
destitue les bouddah de Bamyan
pulvérisés jusqu'à l'oubli
ma pensée
Volutes anarchiques
Traverse les flammes la fumée
Et les nuages de terre battue
Qui me brûlent les yeux
Sur le stade de Kabul on ne joue plus
On exécute
Un fantôme de femme jeté dans l'arène
Tombe à genoux et roule sur le flanc
Sa tête
Minuscule baudruche à bout portant
Explose
Invisible
Sous la burka
Je ne veux pas me rappeler combien ils furent
Sur les gradins
Petite sœur
Cet après-midi-là
Ni penser à ton regard
Derrière les barreaux tissés de coton bleu
Christiane LAÏFAOUI